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    La société nationale des chemins de fer français (SNCF) a fêté cette année ses 80 ans. Sa création remonte en effet au 1er janvier 1938, date d’entrée en vigueur de la convention et du décret-loi promulgués le 31 août 1937 par le gouvernement du Front populaire. La SNCF est créée sous la forme d’une société anonyme d’économie mixte, dont l’Etat possédait 51 % du capital. Elle reprend l’actif et le personnel des quatre grandes compagnies privées (compagnies du Nord, Paris-Lyon-Méditerranée, Paris-Orléans, du Midi, de l’Est) et ceux des réseaux appartenant déjà à l’Etat (chemins de fer de l’Etat, chemins de fer d’Alsace-Lorraine).

    Depuis cette date, le réseau ferré français a connu de nombreuses vicissitudes, notamment pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans l’Est de la France tout particulièrement, les infrastructures et les gares ont subi d’importants dégâts. A partir des années 1970, la décentralisation des transports ferroviaires se met en place progressivement. Les Régions seront amenées à prendre une part croissante dans ce processus. Inaugurée début 1970, la desserte ferroviaire cadencée Métrolor relie Thionville, Metz et Nancy. L’appellation n’est pas neutre : Métrolor a vocation à devenir le Métro des Lorrains. Il s’agit de répondre à leur besoins de mobilité quotidienne pour le travail, les études ou les loisirs.

    A ses débuts, la desserte est financée exclusivement par l’Etat. Les collectivités locales apporteront leur contribution par la suite. Métrolor marque le renouveau des transports ferroviaires régionaux et préfigure la naissance du concept du Transport express régional (TER) seize ans plus tard.

    Carte des transports collectifs régionaux en Lorraine (1991). Le réseau lorrain, particulièrement dense, représente 1848 kilomètres de lignes, soit 5,8 % de l’ensemble du réseau national ferré. Archives de la Région Grand Est, site de Metz, 575 WLO 1.

    Dès sa mise en service, Métrolor inspire d’autres projets semblables ailleurs en France. La desserte Métralsace, dont la Région Alsace accepte de couvrir le déficit d’exploitation, voit le jour en septembre 1980. Il s’agit de cinq allers-retours quotidiens entre Strasbourg et Mulhouse, avec un nombre réduit d’arrêts. Dès 1982, le Métralsace est prolongé vers Saint-Louis et Bâle SNCF.

    Avec le vote de la loi d’orientation des transports intérieurs (dite loi LOTI), le 31 décembre 1982, complétée par les lois du 7 janvier et du 22 juillet 1983, une nouvelle étape est franchie. Ces lois encouragent la décentralisation des transports et introduisent la notion d’autorité organisatrice : une distinction est faite entre le rôle d’organisation et l’exploitant. Les transports ferroviaires relèvent de la compétence régionale et peuvent être conventionnés entre l’Etat, les régions et l’opérateur SNCF.

    La première convention entre la SNCF et la Région Alsace est signée en décembre 1985. La Région Lorraine signe sa propre convention en mai 1989, prenant ainsi la gestion des dessertes Métrolor et Métrovosges.

    En 1986, la SNCF crée la marque TER (train express régional). Les trains omnibus deviennent officiellement des trains TER. Cette marque permet de promouvoir une image plus moderne pour les transports régionaux de voyageurs et souligne l’implication des régions dans l’amélioration des services rendus aux usagers. La marque TER est personnalisable au nom de la Région. Le TER Alsace est inauguré le 15 juin 1986.

    Visuel de la marque TER en 1986. Depuis cette date, le logo a évolué. Archives de la Région Grand Est, site de Strasbourg, 1939 WR 79 (2).

    En 1991, un nouveau type de Métrolor arrive. Ses nouvelles Rames Réversibles Régionales (RRR) affichent une couleur jaune jonquille et sont équipées de cabines publiques de téléphone comme dans le TGV Atlantique. Le Métrovosges sera lui aussi équipé de ce type de matériel roulant moderne.

     

    Rames RRR (1991). Archives de la Région Grand Est, site de Metz, 10 WLO 51.
    Inauguration du TER Lorraine. Radiotéléphone testé en octobre 1990 par Jean-Marie Rausch, président de la Région Lorraine. Archives de la Région Grand Est, site de Metz, 11 Fi 597.

     

    En Alsace, l’expérience Métralsace débouche, après d’importants travaux d’infrastructure, sur la création d’une relation express Strasbourg-Mulhouse à 200 km/h, appelée TER 200. L’inauguration de ce nouveau service a lieu le 26 septembre 1991. L’offre est encore améliorée par la mise en œuvre d’un cadencement à heures fixes à partir du 1er septembre 1998.


    Un TER 200 circulant dans la plaine d’Alsace, à la hauteur de Ribeauvillé (septembre 1991). Archives de la Région Grand Est, site de Strasbourg, 1939 WR 79 (3).

    En 1993-1994, une commission d’enquête présidée par le sénateur haut-rhinois Hubert Haenel fait de nouvelles recommandations pour l’avenir de la SNCF. Elle propose notamment d’ériger les Régions en autorités organisatrices des transports tout en les dotant des moyens nécessaires pour assumer pleinement ces nouvelles fonctions. A compter du 1er janvier 1997, la régionalisation des transports ferroviaires est testée dans six régions, dont l’Alsace. Dès le départ, l’Alsace innove en créant neuf comités de ligne réunissant des usagers, des élus et des représentants de la SNCF. Les effets positifs de l’expérimentation se font bientôt sentir. Entre 1996 et 1998, le trafic progresse globalement de 4,9 % dans les régions expérimentales contre 3,2 % dans les autres régions. Les régions non concernées par l’expérimentation signent tour à tour des conventions intermédiaires pour se préparer à la régionalisation, dont la Région Lorraine en 1998.

    A partir du 1er janvier 2002, l’expérimentation est généralisée à l’ensemble des Régions. Les conseils régionaux décident désormais, sur l’ensemble de leur ressort territorial, du contenu du service public de transport régional de voyageurs et notamment des dessertes, de la tarification, de la qualité du service et de l’information de l’usager. Le TER devient pour les Régions le fer de lance d’une politique ambitieuse de reconquête des territoires.

    Dès 2003, une nouvelle génération de rames est mise en service en Lorraine : le TER du troisième millénaire, une automotrice à deux étages avec un confort digne du futur TGV Est.

    Après une longue attente qui aura duré plus de vingt ans, le TGV Est-Européen est inauguré le 10 juin 2007. Les régions de l’Est de la France accèdent enfin aux avantages de la grande vitesse. La ligne LGV Est Paris-Strasbourg est la première du réseau à grande vitesse français à avoir été cofinancée par les collectivités locales. Parmi les partenaires associés à la réalisation du projet, on trouve la Région Ile-de-France (2 % du budget), les collectivités de Champagne-Ardenne (3 %), Lorraine (6 %) et Alsace (7 %). La mise en service du TGV Est a permis de diviser par deux en moyenne les temps de parcours ferroviaires entre Paris et l’Est de la France. Le temps de trajet Paris-Strasbourg est ainsi passé de 4 heures à 2 heures 20 lors de l’inauguration de la première phase en juin 2007. Le 11 décembre 2016, avec la mise en service de la deuxième phase, il est tombé à 1 heure 50. Le temps de trajet Paris-Metz est passé, quant à lui, de 3 heures à 1 heure 20.

     

    Une rame du tram-train dans la traversée de Mulhouse. Archives de la Région Grand Est, site de Strasbourg, 2545 WR 75

    Un autre événement important a marqué l’histoire de la dernière décennie : l’inauguration du tram-train Mulhouse-Thann le 12 décembre 2010. Il s’agit du premier tram-train interconnecté sur le territoire français. Il peut circuler indifféremment en ville et sur les rails SNCF. La ligne est exploitée conjointement par la société Solea, qui gère les transports en commun de l’agglomération mulhousienne, et par la SNCF. La Région Alsace a contribué au financement à raison de 35 %.
    Désormais à la pointe de la modernité, la ligne Mulhouse-Thann se distingue aussi par son âge vénérable. Inaugurée le 1er septembre 1839, elle est la troisième ligne de chemin de fer de France à avoir été ouverte au trafic passager.

     

     

    Sources

    Les services d’archives de la Région Grand Est conservent sur leurs différents sites (Châlons, Metz, Strasbourg) de très nombreux dossiers relatifs à la régionalisation des transports ferroviaires. Il n’est pas possible de les énumérer ici en détail. On notera que les principaux documents proviennent des directions en charge des transports et de l’aménagement du territoire. Les directions en charge de la communication sont également représentées.

    Bibliographie

    « La grande histoire du train », Saisons d’Alsace, n° 63, mars 2015.
    STOSKOPF (Nicolas), Le train, une passion alsacienne. 1839-2012, Editions Vent d’Est, 2012.
    Ville & Transports, dossier spécial « La Lorraine sur tous les fronts », décembre 2006.
    La vie du rail, n° 2242, avril-mai 1990